Selon le président de la FEO, Mike Foulds, le groupe privilégié qui représente un pour cent de la population est responsable des inégalités de revenu

Le 28 septembre 2016, le magazine MacLean’s a publié un éditorial intitulé « Why the one percent isn’t to blame for income inequity ». Le président de la FEO, Mike Foulds, a réagi en envoyant la lettre suivante à la rédaction du magazine. Une portion de cette lettre a été publiée dans le courrier des lecteurs de MacLean’s le 10 octobre.

Il était décourageant de lire l’éditorial du 28 septembre 2016, intitulé « Why the one percent isn’t to blame for income inequity, Our Editorial: It’s past time to rein in the public sector pension plan bacchanalia » (Pourquoi il ne faut pas blâmer le un pour cent pour les inégalités de revenu. Notre éditorial : Il est grand temps de freiner la bacchanale des régimes de retraite du secteur public), non pas tant comme cotisant à un régime de retraite public conjoint entièrement capitalisé. Il était plutôt décourageant de voir un magazine d’actualités, jadis l’un des meilleurs au Canada, s’enliser dans la boue du « journalisme » de droite, dont Fox News est un triste exemple.

Votre éditorial ne tient pas compte de la notion selon laquelle un « groupe privilégié de « un pour cent » de la population est responsable des vastes problèmes des inégalités de revenu », non pas après un examen minutieux de l’histoire ou des faits, mais par pure ignorance. Les régimes de retraite à prestations déterminées, fort souhaitables, qui sont bien gérés et sont assortis de bons modèles de gouvernance, se portent bien au Canada. Pensons par exemple le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario, capitalisé à 107 % au cours de l’année écoulée; je m’en voudrais aussi de ne pas mentionner le revenu de placement net de 6,7 % de l’OMERS en 2015 ou celui de 9,1 % de la CDPQ la même année. Toute organisation médiatique qui se respecte devrait avoir honte de comparer ces régimes de retraite à prestations déterminées bien gérés et bien gouvernés du secteur public à la mascarade que représente la gestion du régime de retraite à prestations déterminées de la General Motors du Canada limitée (GMCL) sans vraiment se pencher sur les causes du problème du régime de retraite de cette compagnie.

En 1992, le NPD dirigé par Bob Rae a adopté la clause 5.1 de la Loi sur les régimes de retraite, qui autorisait les entreprises dont la caisse de retraite s’établissait à plus de 500 millions de dollars à choisir que leur régime soit traité comme un « régime admissible ». Cette mesure permettait aux entreprises admissibles de financer leur régime de retraite de façon continue afin de réduire considérablement leurs cotisations au régime et, comme on pouvait s’y attendre, leur degré de solvabilité a diminué. À l’instar de la GMCL, d’autres compagnies, comme STELCO et Algoma Steel, ont choisi de profiter de cette offre. STELCO et Algoma ont fait faillite et les retombées de la sous-capitalisation de leur régime de retraite est débattue devant les tribunaux des faillites. La GMCL prétend avoir été au bord de la faillite en 2009, ce qui lui a valu un sauvetage financier s’établissant à des milliards de dollars de la part des gouvernements de l’Ontario et du Canada. La GMCL a utilisé des portions de l’argent des contribuables pour combler le déficit qu’elle avait créé en sous-capitalisant son régime de retraite au moyen de l’échappatoire créée par la clause 5.1.

Votre éditorial ne tient pas compte non plus de l’étude réalisée par le Boston Consulting Group (BCG), qui confirme qu’environ 10 à 15 % des bénéficiaires de prestations déterminées reçoivent le Supplément de revenu garanti (SRG) du gouvernement, comparativement à 45 à 50 % des autres personnes retraitées du Canada. Les régimes à prestations déterminées diminuent d’environ deux à trois milliards de dollars les paiements annuels au titre du SRG, prestation supplémentaire de l’État offerte aux personnes âgées à faible revenu. L’étude indique en outre que les bénéficiaires de prestations déterminées contribuent entre 14 et 16 milliards de dollars chaque année aux coffres des gouvernements au Canada sous forme d’impôts sur le revenu, de taxes de vente et d’impôts fonciers. (https://www.otpp.com/fr/news/article/-/article/701993)

Lorsque l’on compare les prestations de retraite annuelles moyennes versées par l’OMERS (rente initiale moyenne de 28 300 $ par année en 2014), le HOOPP (rente initiale moyenne non réduite de 24 000 $ par année en 2015), ou le RREO (rente initiale moyenne de 45 000 $ par année en 2015) – pour ne nommer que quelques régimes – et les salaires versés aux cadres d’entreprises comme Rogers, où la rémunération totale déclarée du chef de la direction Nadir Mohamed était de 26 769 973 $ en 2013, ou celle de la PDG de la General Motors, Mary Barra, qui s’établissait à 28 588 663 $ en 2015, il semble ridicule de croire qu’une personne rationnelle puisse penser que le régime de retraite à prestations déterminées des travailleuses et travailleurs du secteur public est la cause des « vastes problèmes des inégalités de revenu ». Toutefois, votre éditorial tente de faire valoir cet argument.

« À en juger par les tendances actuelles, les régimes de retraite à prestations déterminées relèveront bientôt du domaine exclusif du secteur public. »

Je crains que vous n’ayez raison. Cependant, UNIFOR, et avant lui TCA et USW, n’ont pas, contrairement à la General Motors, pris une série de mauvaises décisions visant à sous-capitaliser le régime de retraite à prestations déterminées. Ces décisions ont été prises par le « un pour cent » de têtes dirigeantes d’entreprises qui touchent des primes tout en sous-finançant la retraite des membres de leur personnel.

Plutôt que des moqueries au sujet des pensions des employées et employés du secteur privé ou de déclarations selon lesquelles les efforts pour régler le problème des revenus de retraite en améliorant le Régime de pensions du Canada sont malavisés, il serait bienvenu de voir, pour faire changement, des analyses critiques de la façon dont le « un pour cent » des « responsables des vastes problèmes des inégalités de revenu » ont fait en sorte que les régimes de retraite à prestations déterminées du secteur privé soient systématiquement sous-capitalisés jusqu’à l’insolvabilité, au lieu des efforts délibérés de la part d’un magazine d’actualités appartenant à un « un pour cent » de membres privilégiés de la population pour rejeter le blâme sur les employées et employés du secteur public qui travaillent dur.

Le président de la Fédération des enseignantes et des enseignants de l’Ontario

Mike Foulds